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Les Avions CAUDRON

Tome 1 par André Hauet

Caudron G-4 n°9 de l’Escadrille Franco-Belge C74 basée à Hondschoote. © AELR/Collection Terlinden

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« Le ciel est si vaste qu’il s’ouvre à tous »

Roland Garros

S’il est vrai que les grandes entreprises comme les grands chênes commencent par n’être que de frêles racines, c’est dans ce coin de France que devait pousser l’arbre de Caudron.

Petit village de la Somme, probablement fort peu connu des Français et a fortiori des étrangers, fussent-ils des mordus de l’aviation, Favières est le village natal des frères Caudron ; Gaston et René y naissent en janvier 1882 et en juillet 1884. Issus d’une famille de cultivateurs, rien ne laisse prévoir la destinée aéronautique et la place particulière que ce nom va occuper tant dans les rangs de l’époque héroïque que dans les heures de gloire de la coupe Deutsch de la Meurthe.

Leurs études se poursuivent au collège d’Abbeville ; cependant, Gaston qui se destine à la carrière d’ingénieur se voit contraint de les interrompre pour des raisons de santé. René, passionné de sport et de technique, s’intéresse beaucoup à l’évolution de la mécanique. Après le temps du service militaire qu’ils passent tous deux au 16e régiment d’artillerie lourde à Rueil (Seine-et-Oise), on les retrouve à Romiotte, occupés aux travaux de la ferme et à la réparation des futailles de la région, ce qui fera dire à certains chroniqueurs que les Caudron étaient des tonneliers. Mais là n’est pas leur vocation !

René (brevet Aéro-club de France n°180) Alphonse dit Gaston (brevet Aéro-club de France n°434)

1908-1914 Favières dans la Somme Les débuts au Crotoy

La Revue Aérienne, dans son numéro du 25 septembre 1910 relate une interview des frères Caudron :

- Nous avons commencé à construire notre premier appareil en août 1908. C’était un grand biplan de 60 m2 sur lequel nous devions mettre deux moteurs Farcot. Au printemps 1909, fatigués d’attendre des moteurs, nous avons fait du vol plané, traînés par un cheval, avec cet appareil, et les essais ont été réussis. Reculant devant un nouvel achat d’un moteur suffisant, nous avons décidé la construction d’un appareil plus petit, muni d’un Anzani 25 hp. Nous commençâmes la construction le 15 juillet 1909, moi, mon frère et un menuisier très capable qui est maintenant notre chef d’atelier. Le 21 septembre, après quelques essais, je volais quatre fois un kilomètre en ligne droite ; le lendemain, enhardi, je volais sur la campagne et fis des courbes, mais j’étais inexpérimenté et, par un vent un peu violent, je fis une chute de près de vingt mètres de haut. J’étais indemne mais l’appareil en piteux état. Nous réparâmes et je recommençais. L’appareil, en tant que planeur, était semblable à ce qu’il est maintenant avec un gauchissement et avec hélice démultipliée à l’arrière. Tout l‘hiver, nous avons bataillé avec notre transmission par chaîne. J’ai volé quatre ou cinq kilomètres mais le moteur employé était trop brutal pour une transmission. Nous avons successivement brisé ou tordu sept arbres d’hélice, sans compter les clavetages sautés et les coniques guillotinés. Nous avons alors pris le parti de mettre le moteur à l’avant et l’hélice en prise directe. Les essais furent plus suivis et les résultats meilleurs. Au commencement d’avril (1910), je réussis un vol de dix kilomètres, de Romiotte à Forest-Montier et retour, mais les récoltes poussaient et il devenait difficile d’atterrir. Nous fîmes construire un hangar au bord de la mer. La baie de Somme et Paris-Plage sont des endroits tout à fait propices aux essais. Notre biplan est très simple. D’ailleurs, nous avons été forcés de faire simple, notre outillage consistant simplement en un établi, un étau et un porte-foret. C’est suffisant pour construire un aéroplane, y compris l’hélice, puisque nous n’avons acheté que le moteur et les matières premières.

1908-1910 Caudron type A

1908. Wilbur Wright est en France. Au Mans - Les Hunaudières - et à Auvourt, il fait une prestation impressionnante, démontrant ainsi les possibilités de son appareil. Le 13 janvier de cette année, sur un avion construit par Voisin, Henry Farman boucle le premier kilomètre. On parle de Delagrange, de Breguet, de Blériot. Les expériences de ces grands pionniers éveillent chez les frères Caudron l’idée de construire « leur » avion sur lequel « ils » voleront ! Aidés du charron de la ferme, ils aménagent un hangar où est installé un outillage plus que modeste : une perceuse, un établi, des scies... des limes. Au mois d’août, renforcée par la présence de Victor Godefroy, l’unique menuisier de Favières, l’équipe Caudron entreprend la construction de leur premier appareil. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils voient « grand ». Ils s’attaquent d’emblée à un biplan de 60 m2 de surface. Cette cellule est construite pour recevoir deux moteurs Farcot qui doivent entraîner quatre hélices. L’avion terminé, les constructeurs attendent les moteurs - qui n’arriveront jamais - et las de cette attente, au printemps de l’année 1909, les Caudron modifient la cellule et l’aménagent en planeur.

« À toute chose, malheur est bon ! » Pas de moteur, soit ! Gaston et René n’ont jamais « touché » de manche à balai (terme que les avionneurs de l’époque emploient pour désigner le levier de commande), ils décident de se faire la main en se faisant remorquer. Un long câble est attaché au planeur et le relie à une carriole à laquelle on a attelé Luciole, la jument de la ferme. Guidée par Gaston Caudron, elle entraîne au petit trot tout son attirail, pendant que René, aux commandes du planeur, l’arrache du sol au grand étonnement de tout le voisinage venu suivre les évolutions de ces deux jeunes fous. Parfois la nuit se passe à réparer la casse et le lendemain, après un peu de repos, les essais reprennent.

En 1909, les frères Caudron redessinent leur appareil et, le 15 juillet, reprennent la construction de ce qui sera leur premier avion. Les dimensions du planeur sont réduites et un moteur Anzani de 25 ch, placé à l’arrière, est prévu pour entraîner l’hélice propulsive. Une transmission par chaînes relie le propulseur au moteur et cette disposition va causer beaucoup de soucis à nos constructeurs.

Fiche technique du Caudron type A (Notice Caudron - 1910)

Moteur : ................ Anzani 3 cylindres en éventail de 25 ch ....................................................... ou Grégoire Gyp de 28 ch Hélice : .................. type Caudron-bipale-tractive de 2,10 m de diamètre tournant à 1.200 t/m Envergure : ................................................................8,00 m Largeur des ailes : ....................................................1,50 m Entreplan :..................................................................1,50 m Longueur : .................................................................8,00 m Hauteur : ....................................................................2,75 m Surface portante : ..................................................22,00 m2 Poids à vide : ............... 205 à 220 kg en fonction du moteur Distance au décollage : ............................................... 30 m Vitesse : .................................................................. 75 km/h

"L’aile est souple et sa courbure s’efface sous la poussée de l’air.

Après avoir passé tout l’hiver à travailler sur leur transmission par chaînes, les Caudron prennent la décision de mettre le moteur à l’avant et de monter l’hélice en prise directe. Nous sommes en avril 1910 et les résultats obtenus sont à la fois encourageants et enrichissants. René Caudron réussit un vol de 10 km (de Romiotte à Forest-Montier et retour) qui le ramène à son point de départ.

Leur première machine dans sa version définitive préfigure déjà la silhouette du fameux G.3 : biplan, fuselage en poutre (on ne parle pas encore de fuselage, il n’est question que de châssis), les gouvernes à l’arrière, pas de stabilisateur à l’avant, les ailerons sont disposés dans l’entreplan. Ils disparaîtront sur le type B et déjà dans l’évolution du type A. Les installations de la ferme étant devenues trop exiguës, les Caudron s’installent au Crotoy, bénéficiant de la plage où ils ne seront plus gênés par les récoltes pour poursuivre leurs essais ; nécessité faisant loi, ils y créent une école de pilotage afin de trouver une source de revenu. Parmi les élèves de la première heure, il faut citer Duval, qui dès l’âge de dix-huit ans faisait de l’aérostation.

MUSÉE DES Frères Caudron

Au sein du Bureau d’Information Tourisme de la Ville de RUE, venez découvrir l’histoire de deux frères, Gaston et René CAUDRON, fils d’agriculteurs, devenus les premiers constructeurs d’avions en Picardie !

Se passionnant très tôt pour les essais des frères Wright, ils décident de les imiter et commencent à construire leurs avions après leurs essais réalisés en 1909. Rapidement, leur production connait le succès et ils équipent l’armée française de leurs biplans...

Ce musée, regroupant de nombreux documents personnels, bronzes, trophées, maquettes, permet de constater l’évolution en trente années de cette fantastique aventure industrielle.

LES ARCHIVES CAUDRON : UNE MINE D’INFORMATION SUR L’HISTOIRE DE L’AVIATION FRANÇAISE

Ces archives sont en partie constituées des archives familiales et du travail de collecte de Pierre et Denise Roteux.

Elles comportent entre autres de nombreux documents relatifs à l’histoire de la famille Caudron, les appareils Caudron, les registres des pilotes brevetés sur appareils Caudron, les registres de construction et de commercialisation des appareils, les escadrilles de la Première Guerre mondiale, les Usines et écoles Caudron, des revues de presse ainsi que de nombreux ouvrages aéronautiques.

Curieux ou passionnés, vous pouvez faire une demande de consultation ou simplement obtenir plus d’informations sur une période précise.

PIERRE ET DENISE ROTEUX

Au décès de René Caudron, son épouse exécute une de ses volontés en faisant don de la totalité des archives personnelles de la famille Caudron à la ville de Rue si celle-ci s’engage à la création d’un musée. Celui ci voit le jour en 1972 au cœur du Beffroi de Rue.

C’est sans compter la contribution majeure d’un couple de passionnés, Pierre et Denise Roteux, que le musée actuel, au sein de l’office de tourisme, a pu voir le jour.

En effectuant un travail minutieux de collecte de documents et de recherches, ils ont retracé l’histoire complète et détaillée des Frères Caudron, et ont ainsi contribuer largement à la création du musée Caudron.

C’est en leur hommage que la salle de consultation des archives porte leurs noms.

Le musée est accessible du mardi au samedi de 10h à 12h30 et de 14h à 17h (octobre à mars) du mardi au samedi de 9h30 à 13h et de 14h à 17h30 (avril à septembre) du lundi au samedi de 9h30 à 13h et de 14h à 17h30 (juillet à août) le dimanche et les jours fériés de 10h à 13h.

Renseignements : Bureau d’Information Tourisme 03. 22. 25. 69. 94

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